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Dans l’Ituri, province située au nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), les conflits et violences armés maintiennent les populations civiles dans un cycle meurtrier où des milliers de personnes souffrent dans le silence. Pour réduire leur vulnérabilité, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a distribué des vivres et biens essentiels à près de 12 000 personnes revenues chez elles après avoir tout perdu en fuyant des attaques armées.

Dans la chefferie de Mambisa, en territoire de Djugu, chaque famille a reçu des ustensiles de cuisine, du savon, des couvertures et des vivres pour couvrir leurs besoins pendant un mois. Revenues après une série d’incidents violents survenus en août, la plupart de ces familles ont retrouvé leurs maisons incendiées et leurs biens pillés. Par cette aide, le CICR tente de répondre à leurs besoins urgents, mais la principale inquiétude des habitants reste la sécurité.
« Avant la guerre, je vivais ici avec mes neuf enfants et mes petits-enfants », raconte Thérèse, une rescapée dont la maison a été brûlée et plusieurs proches tués ou blessés. « Je n’avais jamais imaginé voir le sang de mes enfants couler dans ma propre maison. La guerre nous a tout pris. »

Depuis plusieurs années, l’Ituri est le théâtre d’une spirale de violences marquée par des affrontements entre groupes armés, des opérations militaires et des attaques ciblant directement les civils. Le droit international humanitaire (DIH) interdit pourtant toute attaque contre les populations et leurs biens. Mais sur le terrain, ces principes sont constamment violés, au prix d’un lourd tribut humain : pertes en vies humaines, déplacements massifs, violences sexuelles, recrutements d’enfants et destruction de moyens de subsistance.


Des besoins croissants dans un espace humanitaire étouffé

Les violences chroniques ont affaibli la résilience des communautés et restreint leur accès aux biens et services essentiels. La peur des attaques empêche de nombreux habitants de rejoindre leurs champs, aggravant la crise alimentaire. Selon les Nations Unies, environ 1,5 million de personnes en Ituri vivent aujourd’hui en insécurité alimentaire.
« Depuis 2017, je me suis déplacée plusieurs fois et j’ai dû changer trois fois de lieu de vie », témoigne Joséphine, bénéficiaire de l’aide du CICR. « Ma famille avait des champs à Fataki, mais nous ne pouvons plus y retourner. Tout a été détruit. »

L’accès aux soins médicaux est lui aussi gravement compromis. Les structures de santé, souvent pillées ou abandonnées, manquent de personnel, d’équipements et de médicaments. Les blessés doivent parcourir de longues distances pour recevoir des soins. Médecins Sans Frontières (MSF), qui soutient la clinique Salama à Bunia, rapporte avoir pris en charge plus de 350 patients blessés par armes depuis le début de 2025, dont 200 entre juillet et octobre.
« Nos équipes constatent une forte baisse du nombre de consultations pour les femmes et les enfants à cause de l’insécurité », précise Alfred Wadie, chef adjoint de la sous-délégation du CICR à Bunia.

L’afflux massif de personnes déplacées internes accentue la pression sur les infrastructures déjà fragiles. Dans les zones d’accueil, le manque d’eau potable pousse certaines familles à consommer de l’eau non traitée, augmentant les risques de maladies hydriques et de tensions communautaires.


Des blessures invisibles : le poids du traumatisme

Au-delà des pertes matérielles et humaines, les habitants de l’Ituri portent des blessures psychologiques profondes. Les déplacements répétés, la séparation des familles, les violences sexuelles et les scènes de guerre laissent des traces durables.
Les structures de santé mentale appuyées par le CICR enregistrent une hausse alarmante de cas de dépression, d’anxiété et de stress post-traumatique. Ces souffrances affectent non seulement les individus, mais aussi la cohésion sociale de communautés déjà fragilisées.

Face à cette crise prolongée, le CICR appelle toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire.
« Nous demandons à tous les acteurs armés de prendre conscience de l’impact dramatique de leurs actions sur les civils », insiste François Moreillon, chef de délégation du CICR pour la RDC. « Il est urgent de protéger les populations et leurs biens, conformément au DIH et aux principes humanitaires. »

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