
À Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu, les risques d’incendie atteignent un seuil alarmant en cette saison sèche. Des spécialistes en gestion des catastrophes pointent du doigt plusieurs failles graves dans la prévention des incendies. « Il n’existe aucun plan de contingence à l’échelle urbaine pour répondre efficacement à un incendie de grande ampleur », alerte Patrick, expert en gestion des risques. Les habitations, souvent construites en matériaux inflammables et très rapprochées, accentuent cette vulnérabilité.
Selon plusieurs experts, la structure de Protection civile censée jouer un rôle de premier plan dans la prévention et la gestion des incendies, demeure étonnamment silencieuse et inactive. « C’est comme si la Protection civile attendait que le feu ravage un quartier entier avant d’apparaître. Il y a une absence criante d’anticipation », déplore Nadège, ingénieure en sécurité incendie. Elle souligne que dans plusieurs marchés et quartiers populaires, aucun dispositif de lutte contre le feu, comme les extincteurs ou les bouches d’incendie, n’est installé.
Un autre point faible souligné par les professionnels est le manque total de systèmes d’alerte ou d’éducation de la population sur les gestes de prévention. Pour le professeur Jean-Claude, spécialiste en environnement et urbanisme, « il faut une sensibilisation communautaire soutenue, des simulations d’évacuation et un accès aux outils de première intervention. Or, tout cela manque cruellement à Bukavu. » Cette lacune crée un climat d’indifférence dans la population, qui continue de vivre dans le risque sans y être préparée.
À cela s’ajoute la précarité énergétique et les branchements anarchiques à l’électricité, qui constituent une véritable bombe à retardement. « Chaque saison sèche, les incendies sont liés aux courts-circuits ou à l’usage de braises dans des maisons mal ventilées », précise Alain, technicien en électricité. Il insiste sur l’urgence d’une inspection régulière des installations domestiques par des services compétents, chose quasi inexistante actuellement.
Face à cette menace grandissante, les experts recommandent une réforme urgente de la Protection civile, l’élaboration d’un plan de contingence provincial et la dotation des quartiers à risque en dispositifs d’alerte et d’extinction. L’heure n’est plus à l’attente, préviennent-ils : « Si rien n’est fait, les incendies ne seront plus des faits divers, mais des catastrophes humaines et économiques prévisibles », conclut Nadège.
N.A.E
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